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L’importance de la collaboration et de la mise à jour des informations professionnelles

Obligation de collaboration du professionnel et mise en garde contre l’entrave

La mission première d’un ordre professionnel est d’assurer la protection du public, notamment en s’assurant de la qualification, la compétence et l’intégrité de ses membres. En ce sens, il n’est pas surprenant que chacun des ordres professionnels dispose de différents mécanismes de surveillance, de contrôle et de discipline prévus par la loi.
Afin de s’acquitter de leurs fonctions, le bureau du syndic et l’inspection professionnelle (IP), notamment, doivent être en mesure de prendre connaissance en temps opportun des documents nécessaires à une enquête ou une inspection — comme les dossiers de client(e)s ou encore de discuter avec le membre concerné. C’est dans ce contexte que le législateur vient codifier l’obligation de collaboration des membres ; la contrepartie aux privilèges conférés par le droit d’exercer sa profession.

Dans cette perspective, les articles 114 et 122 du Code des professions mentionnent qu’il est interdit d’entraver de quelque façon que ce soit l’IP ou le bureau du syndic dans l’exercice de leur fonction. Qui plus est, l’article 89 du Code de déontologie des ergothérapeutes ajoute que l’ergothérapeute doit répondre de façon complète et véridique, dans les plus brefs délais, à toute demande verbale ou écrite provenant d’un membre du personnel de l’Ordre. Ces exigences visent encore une fois à s’assurer que la mission de protection du public de l’Ordre soit remplie pleinement par tous les acteurs concernés.

De plus, il est d’usage que le bureau du syndic ou encore l’IP assortisse leur demande de renseignements ou documents d’un délai. Dans la même logique que précédemment exposée, il est du devoir du membre de respecter ce délai. Un emploi du temps chargé, la bonne foi ou le fait d’être persuadé de ne pas être en faute n’exonèrent pas le membre de l’obligation de donner suite aux demandes de l’Ordre et d’en faire une réelle priorité. À défaut, le comportement du membre sera assimilé à de l’entrave en ce qu’il fera obstacle au travail de l’IP ou du bureau du syndic. Toutefois, il est possible qu’un contexte particulier chez le membre puisse justifier une prolongation de délai ou des précisions quant à la demande de renseignements, mais c’est au membre d’exposer la situation dans les plus brefs délais et d’en faire la demande. Ainsi, l’IP ou le bureau du syndic évalueront sa pertinence et pourront y donner suite le cas échéant.

Par ailleurs, la jurisprudence des différents conseils de discipline est venue apporter des précisions quant à la notion de collaboration et d’entrave. Ainsi, l’obligation de collaboration exigée du membre en est une de résultat et non de simple moyen. 

En tout temps, le membre doit répondre de façon précise, transparente et complète. • Il ne peut pas refuser de fournir un renseignement ou un document ;
• Il ne peut pas falsifier des documents ;
• Il ne peut pas refuser de donner suite à une correspondance de l’Ordre ou encore sciemment ne pas en prendre connaissance ;
• Il ne peut pas démissionner de l’ordre pour éviter une inspection ou une enquête ;
• Il ne peut pas invoquer que les renseignements demandés relèvent de sa vie privée ou qu’ils relèvent du secret professionnel et remettre ainsi en question la pertinence de l’information demandée par le syndic ;
• Il ne peut pas refuser de se rendre disponible pour une rencontre avec le syndic ou un inspecteur.

Enfin, il est clairement établi dans la jurisprudence qu’un membre visé par une enquête ne peut imposer ses préférences quant aux modalités d’enquête du syndic (imposer un délai non justifié dans un contexte ou encore préférer un entretien téléphonique à un entretien en présentiel).

En cohérence avec l’importance de l’obligation de collaboration chez les membres d’un ordre professionnel, les sanctions disciplinaires associées aux infractions d’entrave sont significatives. 
En ce sens, les conseils de discipline reconnaissent que l’entrave affecte et retarde grandement le travail de l’IP et du bureau du syndic. C’est pourquoi dans des décisions récentes, certains membres se sont vu imposer une période de radiation temporaire variant de un à six mois selon les faits, le contexte et la nature de l’entrave notamment. Dans une décision de 2023[1], le conseil de discipline de l’OEQ a ainsi imposé une période de radiation de trois mois à une ergothérapeute qui a omis de transmettre dans le délai indiqué tous les documents demandés par l’IP et la syndique adjointe en plus d’être reconnue coupable d’entrave pour ne pas s’être présentée à une rencontre avec cette dernière.
Plus récemment encore, une décision rendue en février 2024[2] est venue sanctionner une ergothérapeute ayant entravé à plusieurs reprises le travail d’enquête du bureau du syndic les faits révélaient que cette dernière à chercher à tromper les syndics adjoint(e)s en partageant de fausses informations. Étant donné la gravité de l’entrave, l’ergothérapeute s’est vu imposer une radiation temporaire de six mois. Enfin, dans une autre décision rendue en mai 2024[3], une ergothérapeute s’est vu imposer une radiation temporaire de trois mois pour avoir sciemment entravé l’enquête du bureau du syndic en refusant de communiquer avec les syndics adjoint(e)s et en faisant défaut de se présenter à une rencontre paralysant ainsi l’enquête pendant plusieurs mois. En somme, il est important de se rappeler que l’entrave est une infraction particulièrement grave qui mérite d’être fortement réprimée puisqu’elle porte directement atteinte à la protection  du public.

L’obligation de tenir à jour ses informations professionnelles

Lors de son inscription au Tableau des membres ou encore lors de son renouvellement durant la période de cotisation annuelle, l’ergothérapeute est invité à valider plusieurs informations professionnelles le concernant. Ainsi, le membre actualise au besoin ses adresses de correspondance, mais également son ou ses lieux d’exercice (LE). Ces informations sont essentielles pour l’Ordre puisqu’elles permettent notamment de communiquer avec le professionnel en temps opportun. Loin d’être évalué comme une formalité administrative, tenir à jour ses informations professionnelles est considéré par le législateur comme une obligation légale pour tous les professionnel(le)s québécois. Effectivement, l’article 60 du Code des professions stipule aussi que le membre doit également aviser l’Ordre de tout changement concernant ses LE, et ce dans les 30 jours du changement.

Ainsi, plusieurs situations entraînent l’obligation pour l’ergothérapeute de procéder à l’actualisation de ses LE et d’en aviser l’Ordre avant l’expiration du délai de 30 jours. Ces situations visent notamment la terminaison d’un emploi, le changement d’employeur, le congé de maternité et le retour de l’ergothérapeute après celui-ci, l’arrêt de travail prolongé, l’ajout d’un 2e lieu d’exercice ou encore la décision de commencer une pratique autonome. Le membre dispose ainsi de 30 jours pour modifier ses informations et en aviser l’Ordre. Or, malgré les nombreux rappels, notamment au moyen des infolettres et durant la période de réinscription annuelle, il est régulièrement constaté l’omission par plusieurs membres de se conformer à cette obligation. À cet effet, le conseil de discipline est venu préciser que le respect de cette obligation est l’un des mécanismes permettant à l’Ordre d’accomplir son objectif de protection du public. Mais pour ce faire, ce dernier doit pouvoir détenir des informations fiables et véridiques, notamment sur le lieu d’exercice d’un professionnel. Le lieu de travail d’un membre permet de le retracer au besoin et peut révéler des risques dans sa pratique aux différentes instances de l’Ordre qui pourraient, par exemple, décider d’inspecter la personne professionnelle. L’obligation d’informer l’Ordre de tout changement dans l’exercice de la profession et de compléter les renouvellements d’adhésion avec des informations véridiques et fiables est primordiale. D’ailleurs, le conseil de discipline de l’OEQ a sanctionné cette omission dans deux décisions rendues cette année et a imposé une amende de 5 000 $ dans l’un[4] des dossiers et une période de radiation temporaire de deux (2) mois dans l’autre[5]. Il est donc attendu des membres qu’ils demeurent vigilants et proactifs lorsqu’un changement les concernant survient.

Le bureau du syndic de l’OEQ